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LAUZE Catherine [née FILIPPI Anne, Catherine, épouse PELLOUX-FERJOULI, puis épouse LAUZE]

  • Renaud Poulain-Argiolas
  • 1 oct.
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 2 oct.

Née le 22 février 1884 à Talasani (Corse), morte le 17 mars 1956 à Marseille (Bouches-du-Rhône) ; domestique, piqueuse de bottines ; militante communiste ; membre de l’Union des Femmes françaises ; résistante.


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Les parents de Catherine Filippi étaient natifs du canton de Pero-Casevecchie en Haute-Corse. Son père, Simon Filippi, né comme elle à Talasani, fut cordonnier, puis aubergiste, le métier qu’il exerçait dans le quartier de Ficaretto à la naissance de sa fille. C’est d’ailleurs dans ce quartier qu’elle vit le jour. Sa mère, Marie Xavière Nicolini, était de la commune voisine de Velone-Orneto. Cette dernière, sans profession, avait déjà eu deux filles : Laure Françoise en 1875 et Marie Eve en 1880.


Dans le cadre de la guerre franco-prussienne, Simon Filippi fut incorporé en juillet 1870 dans le 74e régiment de ligne, qui participa notamment aux batailles de Wissembourg et de Reichshoffen en août 1870, puis au siège de Strasbourg, qui se solda fin septembre par la capitulation de l’armée française face aux forces prussiennes. Sa fiche de matricule militaire le décrit comme mesurant 1,64 m. Blond aux yeux gris, il avait un visage ovale et était « gravé », c’est-à-dire tatoué. En novembre 1894, alors qu’il était buvetier à Lupino (dans le canton de Bastia) il commit un homicide dans son établissement sur la personne d’un négociant, Jean Gandolfi, qui tenait une buvette à proximité de la sienne. La cour d’Assises de Bastia mentionna en juin 1895 que sa femme faisait passer des bouteilles d’alcool en ville en fraudant l’octroi. Il fut condamné à 12 ans de travaux forcés. Transféré à Marseille en août, il embarqua sur Le Calédonie en février 1896 pour le bagne de Nouvelle-Calédonie. Il bénéficia d’une remise de peine de deux ans pour bonne conduite et fut libéré en 1904. Il sera réhabilité judiciairement en 1914 et finira sa vie à Toulon (Var).


Domestique en 1901, Catherine Filippi habitait 15 rue des Enfants abandonnés. Elle accoucha d’un fils, Clément, né de père inconnu. Celui-ci fut reconnu quelques années plus tard par Victor Amoretti, cordonnier de son état. Les documents manquent pour déterminer si Catherine Filippi et Amoretti vivaient maritalement ou pas. Il semblerait que la formation professionnelle de son père l’ait inspirée, car elle exerça comme piqueuse de bottines et choisit des compagnons successifs qui étaient des travailleurs du cuir. Habitant rue de la Thèse avec ses parents, elle donna le jour en 1911 à un deuxième fils, Élie, dont la naissance fut légitimée par son mariage le 25 juillet 1912 avec Joseph Pelloux-Ferjouli, cordonnier. Le couple était domicilié au n°66 de la rue Clovis Hugues. Durant l’été 1918, elle perdit son mari. Elle se remaria le 11 octobre 1919 avec Louis Lauze, cordonnier lui aussi. Les Lauze eurent une fille, Mireille, l’année d’après.


Catherine Lauze adhéra au Parti communiste français, tout comme son mari, leur fille Mireille, Valentine Lauze – demi-sœur de Mireille, que Louis avait eu d’un premier mariage – et Fortuné Jayne, le mari de Valentine. Ce fut également le cas de Clément Amoretti, l’aîné des enfants de Catherine. Au début de la Seconde guerre mondiale, le foyer des Lauze était situé au n°63 groupe HBM, dans le quartier de La Capelette. Ils prirent part à la Résistance. Mireille fut déportée en Allemagne et mourut au camp de Ravensbrück.


Après la guerre, la rue du domicile familial fut baptisée boulevard Mireille Lauze. Catherine Lauze rejoignit l’Union des Femmes françaises (UFF) avec qui elle milita en plus de son engagement au PCF. Lors des manifestations politiques et des rassemblements commémoratifs marseillais, elle représentait la mémoire de sa fille. C’est d’ailleurs souvent en tant que mère de Mireille Lauze que Catherine Lauze était présentée dans la presse communiste, parfois sans que son propre nom ne soit mentionné. En mai 1950, elle participa à la campagne pour l’interdiction de la bombe atomique menée par le PCF. L’Humanité du 20 mai publiait des extraits de la lettre qu’elle avait adressée à Frédéric Joliot-Curie pour le remercier pour son action en faveur de la paix. Celui-ci venait d’être révoqué par le gouvernement Bidault de son poste de Haut-commissaire au CEA. Après avoir recueilli 783 signatures, elle écrivait : « Là ne s’arrêtera pas notre travail. Nous trouverons encore des masses de braves gens qui condamnent les gouvernements criminels qui voudraient employer la bombe atomique. »


En octobre 1950, elle manifesta sa solidarité avec les « dix de La Bocca », trois cheminots (dont Louis Ruffino) et sept métallurgistes jugés par le tribunal militaire de Marseille au fort Saint-Nicolas. Participant à une journée d’action contre la guerre d'Indochine à l'appel du Parti communiste, ils s’étaient opposés, le 5 mai d'avant, au chargement de matériel de guerre dans un train à Cannes-La Bocca et s'étaient battus, selon l'Humanité, avec des "gardes républicains" (il pourrait s'agir de CRS). Durant le procès, un large mouvement de soutien s’exprima dans la cité phocéenne pour obtenir l’acquittement : traminots, cheminots, travailleurs de l’industrie chimique, du bâtiment, de la métallurgie, usine à gaz d’Arenc et équipages débrayèrent pendant plusieurs heures. Des messages de fraternité arrivèrent en provenance d'entreprises de toute la France. De nombreux responsables de la CGT, militants communistes et personnalités engagées se rendirent au tribunal, dont Mireille Dumont, sénatrice des Bouches-du-Rhône, Jean-Paul Comitti, conseiller de l’Union française, Josette Reibaut, figure de l’UFF, Alexandre Crottier-Combe, conseiller municipal de Marseille, Jules Duchat, secrétaire de la CGT, et Catherine Lauze. Les accusés étaient défendus par Michel Bruguier, militant communiste et ancien résistant. Le premier jour furent cités par la défense : Léon David, sénateur des Bouches-du-Rhône, Henri Pourtalet, député des Alpes-Maritimes, Emmanuel d’Astier de la Vigerie, député d’Ille-et-Vilaine, et Justin Godart, ancien ministre radical-socialiste. François Billoux, député des Bouches-du-Rhône, prit longuement la parole pour lier l’action des accusés aux guerres coloniales de la France, au prolongement du service militaire et à la politique de l’URSS et des USA. L’intervention de Virgile Barel, député des Alpes-Maritimes et ancien résistant, fut elle aussi particulièrement remarquée. Si des peines de prison ferme furent prononcées, la mobilisation massive les avait considérablement allégées.


Catherine Lauze s’éteignit en 1956 à Marseille. Elle fut reconnue comme membre des Forces Françaises de l’Intérieur (FFI), tout comme son mari Louis Lauze, leur fille Mireille et leur beau-fils Fortuné Jayne.


Son fils Clément Amoretti (1901-1962), traminot communiste, fut actif à la CGT et homologué FFI. Le fils de celui-ci, Jean-Marius Amoretti (1928-2002), suivit le parcours professionnel, politique et syndical de son père. Résistant malgré son jeune âge, il fut reconnu comme FFI.


Sources : État civil de Talasani Naissances 1884, Acte n°2. — État civil de Marseille, Mariages 1912, Acte n°16. — Notice Soleils rouges de LAUZE Louis. — SHD, Vincennes GR 16 P 343584 (nc). — Articles de l’Humanité, « La maman de Mireille Lauze écrit à Joliot-Curie », 20 mai 1950 ; « Au procès des dix de La Bocca : émouvantes dépositions des témoins de la défense », 13 octobre 1950. — Le Monde, 11 octobre 1950 ; 13 octobre 1950. — Propos recueillis auprès de Maddy Amoretti. — Mémoire des Hommes. — [Sur Simon Filippi] Arch. Dép. Corse, Registre matricule, Classe 1867, 9 NUM 8/159. — Le Petit Bastiais, 9 juin 1895. — Propos recueillis auprès de Lætitia Filippi.


1ere version : 23 septembre 2025.

2e version : 1er octobre 2025.

3e version : 2 octobre 2025.

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Passionné d'histoire, j'ai collaboré pendant plusieurs années au Maitron, dictionnaire biographique du mouvement ouvrier - mouvement social.

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