LAUZE Mireille
- Renaud Poulain-Argiolas
- 21 mai
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 2 oct.
[Cette biographie s'inspire d'un texte originellement écrit par Antoine Olivesi. Je l'ai complété, en mettant en gras mes propres apports pour pouvoir les distinguer.]
Née le 29 mars 1920 à Aubagne (Bouches-du-Rhône), morte le 8 mars 1945 à Ravensbrück (Allemagne) ; sténo-dactylo ; militante communiste de Marseille ; militante associative ; membre de l’Union des jeunes filles de France (UJFF) ; résistante de l’Union des Jeunes filles résistantes et des Francs-Tireurs et Partisans français (FTPF) ; déportée.

Mireille Lauze était la fille de Louis Lauze, cordonnier et militant communiste, et de Catherine Filippi (voir Catherine Lauze), qui fut militante du PCF et de l’UFF. De plus, elle aurait été parente avec la syndicaliste Rose Lauze. Elle avait une demi-sœur, Valentine Lauze, de vingt ans son aînée, qui était issue d’un premier mariage de son père. Du côté de sa mère, elle avait deux demi-frères, issus d’unions précédentes : Clément Amoretti, né en 1901, et Éloi Pelloux-Ferjouli, né en 1911.
Elle fit ses études à Marseille, obtint le brevet élémentaire puis, malgré des déplacements fatigants depuis Aubagne, celui de sténo-dactylographie. Tout comme son père, elle était investie aux AIL (Amis de l’instruction laïque). En septembre 1933, elle y dirigeait l’activité basket-ball et gymnastique avec Auguste Borel dans le quartier de La Barasse à Marseille. En janvier 1935, l’assemblée générale des AIL de La Barasse la désigna comme secrétaire de la commission sportive avec un certain "Dédé".
En 1936, Mireille Lauze adhéra à l’Union des Jeunes filles de France (UJFF) avant de rejoindre les rangs du Parti communiste. Sa demi-sœur Valentine et son demi-frère Clément y furent également actifs. Elle participa au mouvement d’aide aux républicains espagnols, effectuant notamment des travaux pour la compagnie maritime France-Navigation, créée en 1937 pour envoyer des armes et des denrées pour résister aux troupes franquistes.
Jusqu’à la déclaration de guerre elle était la secrétaire du député Jean Cristofol, qui fut incarcéré après l’interdiction du Parti communiste. Sans emploi au début de l’année 1940, elle travailla par la suite comme employée de bureau aux Forges et chantiers de la Méditerranée, situées sur l’avenue de Toulon, une entreprise de construction navale de La Seyne (Var) qui avait un atelier à Marseille.
En 1940, alors qu’elle vivait entre Aubagne et Marseille, elle s’engagea dans la Résistance, rédigeant et publiant des tracts qu’elle faisait circuler autour d’elle. Elle milita aussi pour réorganiser l’UJFF, dissoute en même temps que le PCF. Dans les derniers mois de 1940, elle travailla dans la clandestinité avec Pierre Georges, alias "Frédo" , qui n’était pas encore connu sous le nom de Colonel Fabien. Celui-ci, évadé et réfugié à Marseille, dirigea la Jeunesse communiste du Sud-Est et créa les bases de l’Organisation spéciale (OS) à laquelle Mireille Lauze participa.
Louis Lauze donnera plus de détails sur l’engagement de sa fille après la guerre. Avec sa femme et sa fille, ils vivaient au n°63 groupe HBM, à La Capelette, dans la banlieue marseillaise. Mireille fut d’après lui contactée en juin 1940 par Pierre Doize en vue de constituer du matériel de propagande. En septembre 1940, sous le pseudonyme de "Monique" elle fut chargée par "Frédo" de diriger à Marseille les groupes de jeunes filles résistantes. Ces derniers étaient constitués en triangles dans lesquels seule une des membres avait la liaison avec d’autres responsables d’un grade supérieur dans l’organisation. Depuis le premier groupe créé en septembre, on en dénombrait en décembre de la même année plus de soixante. Découvert par la police de Vichy, "Frédo" dut quitter Marseille. Il se rendit en Corse organiser la Résistance. Avant de partir, il nomma Mireille Lauze chef départemental des Jeunes filles résistantes des Bouches-du-Rhône. Il lui confia l’organisation de la collecte des armes qui furent envoyées aux FTPF dans la zone occupée. En décembre 1940 et janvier 1941, 44 revolvers furent apportés à Paris sur les ordres de "Monique". Fin janvier 1941, elle était nommée responsable recrutement armes pour les FTPF de la région des Bouches-du-Rhône et de la Zone Nord. Elle mènera cette activité d’agente de liaison et de courrier jusqu’à son arrestation le mois suivant.
En janvier 1941, elle était mise à la porte des Forges et chantiers de la Méditerranée. Toujours d’après le témoignage de son père, Monsieur Delacourt, directeur des ateliers, la dénonça à la police pour son activité de résistante. Elle fut arrêtée le 17 février 1941 par la police française, en même temps que d’autres adolescents, pour une distribution de tracts autour des lycées Thiers et Saint-Charles. Incarcérée pendant huit jours à l’Évêché, elle y subit de longs interrogatoires, ponctués de sévices cruels destinées à lui faire donner les noms de ses donneurs d’ordre. Elle dut rester quasiment sans manger et fut contrainte à ne pas s’asseoir. Elle serait restée muette face à la police.

Après neuf mois d’emprisonnement aux Présentines, la section spéciale du tribunal militaire de la XVe région de Marseille, présidée par le colonel Mahuet, la condamna le 17 novembre à 15 ans de travaux forcés, à la dégradation civique et à 25 ans d’interdiction de séjour. On la transféra à Lyon – où elle fut détenue à la prison Saint-Joseph de décembre 1941 à mars 1944 – puis à Chalons-sur-Marne jusqu’en avril 1944. Elle fut déportée de Paris à Ravensbrück (Allemagne), à 80 km au nord de Berlin, le 13 mai 1944 dans le convoi I. 212, qui transportait plus de 550 femmes. Dans les prisons comme dans le camp allemand, ses camarades lui confièrent le poste de responsable à la solidarité des résistantes françaises. L’administration nazie lui attribua le matricule 39112. Elle mourut à Ravensbrück de maladie et d’épuisement le 8 mars 1945. Le camp sera libéré moins de deux mois après, le 30 avril, par l’Armée rouge.
En octobre 1945, Mireille Lauze était reconnue "Morte pour la France". Elle reçut la Croix de guerre avec étoile de bronze à titre posthume en décembre 1946 et fut citée selon l’Ordre général n°47 du général Olleris, commandant la IXe région militaire : « Pour service exceptionnel rendus aux cours des combats de la Libération de la France. »
Durant l’été 1947, Louis Lauze réalisa les démarches nécessaires pour faire reconnaître l’engagement dans la Résistance de sa fille. La commission régionale, présidée par le colonel Simon, ex chef régional FFI et militant communiste, la considérait comme lieutenant à la date de son arrestation. En novembre 1947, Mireille Lauze était homologuée aspirant FFI par la commission nationale n°27.276, représentée par le capitaine Savoie, secrétaire, et le colonel Dauphin alias "Duc", président.
Pierre Doize attestait par écrit en janvier 1950 qu’elle avait participé à la formation des premiers groupes de FTPF dans les Bouches-du-Rhône et « à l’organisation des premiers groupes de résistance armée de de Zone Sud ». Il ajoutait qu’elle s’était rendue à deux reprises à Miramas à sa demande pour récupérer des armes qui avaient été ensuite envoyées en Zone Nord.
L’État-major de la IXe région militaire attribua à Mireille Lauze en mai 1950 un certificat d’appartenance aux Forces françaises de l’Intérieur (FFI) au titre de services rendus aux FTPF du secteur de Marseille. En août 1957, elle était reconnue parmi les Déportés et Internés de la Résistance (DIR). Le 3 juin 1960, elle fut médaillée de la Résistance à titre posthume (publication au Journal officiel le 10 juin 1960).
L’Union des Femmes françaises (UFF) baptisa "Mireille Lauze" un de ses centres d’accueil, situé sur le boulevard Charles Nédélec. En 1949, lors du 3e congrès national de l'UFF se déroulant à Marseille, une partie des déléguées y furent reçues.
Un boulevard de Marseille fut baptisé à son nom dans le quartier où elle avait vécu.
Une rue d’Aubagne porte de même son nom.
Outre ses parents, son demi-frère Clément Amoretti, son neveu Jean-Marius Amoretti (fils du précédent) et son beau-frère Fortuné Jayne (mari de Valentine Lauze) participèrent à la Résistance et furent homologués FFI.

Sources : État civil d’Aubagne. — SHD Caen, AC 21 P 590718 (nc) ; AC 21 P 473 458 (nc). — SHD Vincennes, GR 16 P 343589 . — Arch. Dép. Rhône, II M 3/54, VM 2/245, M 6/8340, M 6/10803. — Arch. com. Marseille, listes électorales de 1935. — Délibérations du conseil municipal de Marseille, 1946. — D. Moulinard, Mémoire de Maîtrise, op. cit. — E. Sargès, Aubagne sous la IIIe République, op. cit.. — Le Petit Provençal, 28 septembre 1933 ; 22 janvier 1935. — Le Petit Marseillais, 8 novembre 1941. — L’Écho d’Alger, 9 novembre 1941. — Rouge-Midi, 11 et 12 mai 1947 (photo). — « Troisième Congrès National de l’Union des Femmes Françaises », l’Humanité, 4 juin 1949. — Provence nouvelle, mai 1953 (photo). — Frédéric Guilledoux, "Aubagne : Mireille Lauze, engagée pour les femmes et la liberté", La Provence, 7 mars 2021 (en ligne). — Livre-Mémorial, Fondation pour la Mémoire de la Déportation. — Propos recueillis auprès de Maddy Amoretti (septembre 2025). — Renseignements communiquées par Paulette Laugery et Georges Righetti.
1ere version dans Le Maitron par Antoine Olivesi : 24 novembre 2010.
2e version complétée par moi dans Le Maitron : 9 mars 2022.
3e version : 20 septembre 2025.
4" version : 23 septembre 2025.
5e version : 2 octobre 2025.




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