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Renaud Poulain-Argiolas

MIGDAL André

Dernière mise à jour : 26 avr.

Né le 21 juin 1924 à Paris (XIVe arr.), mort le 19 février 2007 à Paris (Xe arr.) ; écrivain et poète ; militant communiste ; résistant de l’Organisation Spéciale et du Front national de lutte pour la libération ; interné ; déporté à Neuengamme.


André Migdal jeune

Issu d’une famille juive qui comptait onze enfants, André Migdal y était le quatrième garçon. Son père, Joseph (Jossek) Migdal, était tailleur. Juif polonais né à Ostrow (Russie), il avait fui les pogroms et immigré en France à 14 ans. Sa mère, Sophie, Bertha, née Pester, était originaire de Würzbourg (Bavière) et arrivée en France avec sa famille à l’âge de quatre ans. Tous deux avaient été naturalisés français. Les Migdal étaient domiciliés 72, rue Claude-Decaen à Paris (XIIe arr.).


Tout comme ses frères Henri, né en 1920, et Robert, né en 1922, André était membre des Jeunesses communistes. D’après l’historienne Claudine Cardon-Hamet, ils firent tous les trois partie pendant l’Occupation de l’un des premiers groupes armés de l’OS (Organisation Spéciale du Parti communiste) à Paris.


Au début de l’Occupation, Pierre Pannetrat, ancien trésorier de la 12e section de Paris-Ville, mit en place un centre clandestin de diffusion de tracts approvisionné par des délégués de région du PC et distribués par les jeunes militants du secteur. Les papillons et les graffitis attirèrent l’attention de la police qui fit une perquisition le 25 janvier 1941 au 15, rue Édouard-Robert, chez Ludovic et Raymond G. (un père et son fils). 15 000 tracts ronéotypés furent découverts ainsi qu’un grand nombre d’exemplaires de l’Avant-Garde et de papillons. Interrogés par la police, le père et le fils donnèrent une liste nominative de leurs contacts dont les frères Migdal et la famille Pannetrat. Tous furent arrêtés à leurs domiciles respectifs le lendemain. Appréhendé chez ses parents, André Migdal avait sur lui un exemplaire de l’Humanité clandestine de décembre 1940. Après plusieurs interrogatoires, le commissaire André Cougoule, chef de la brigade spéciale, inculpa seize personnes, dont les trois frères Migdal pour "diffusion des mots d’ordre de la IIIe Internationale communiste" et les fit conduire au Dépôt. Âgé de seize ans et demi, André Migdal fut transféré au quartier des mineurs de la prison de Fresnes. Le 30 mai, ils comparaissaient devant la 15e chambre correctionnelle. Trois pères furent convoqués à l’audience comme civilement responsables, dont Joseph Migdal. Ses trois fils furent défendus par Michel Rolnikas, avocat du Parti communiste (lui-même arrêté le mois suivant et fusillé en septembre). André Migdal fut condamné à six mois de prison. Leur avocat fit appel, mais les sentences furent plus sévères.


Il fut de nouveau arrêté en septembre 1942 et interné au camp de Pithiviers (Loiret). Pendant quatorze mois il s’attira les foudres du commandant du camp en refusant de travailler. Il apprit l’arrestation de ses parents, pris avec plus de 150 habitants de leur immeuble. Joseph et Sophie Migdal furent déportés à Auschwitz le 13 févier 1943. Le 19 novembre 1943, André Migdal fut transféré au camp de Voves (Eure-et-Loir) avec une centaine d’autres internés. Le camp était très structuré politiquement grâce à l’action de nombreux cadres syndicaux et politiques du PCF. André y fréquenta l’université du camp, organisée en accord avec la direction. Il écrira plus tard dans Les Plages de sable rouge à propos de cette expérience : "C’est à Voves que j’ai appris à vivre, à devenir un homme. C’est dans ce camp que mes yeux se sont ouverts à l’encre fraternelle, tremplin des jours d’espoirs, bien au-delà des fers fabriqués par les monstres". Le 9 mai 1944, trois jours après l’évasion collective de quarante-deux internés, le camp de Voves fut dissous. Les 407 prisonniers restants furent emmenés à Compiègne. André Migdal était encore une fois l’un des plus jeunes. Le 21 mai 1944, ils étaient à bord du convoi I. 214, transportant 2004 hommes, à direction de Neuengamme via Buchenwald. Arrivé le 24 mai, André Migdal reçut le matricule 30655. Il fut affecté au kommando Bremen-Farge, base sous-marine de la mer du Nord, surnommée « le Tombeau des Français ». Plus de 2000 déportés y travaillaient pour la direction de la construction de la marine allemande à l’édification de l‘abri sous-marin "Valentin". Par la suite il fut intégré dans le kommando Bremen-Osterort (également appelé Riespott et Hornisse), réalisant un bunker pour abriter la production et la réparation d’éléments de sous-marins assemblés à Bremen-Farge. Il racontera la vie dans ce kommando dans son livre Chronique de la base.


Au printemps 1945, devant l’avancée des troupes alliées, les SS firent évacuer Neuengamme et déplacèrent 10 000 déportés vers Lübeck (sur la mer Baltique). Ceux-ci furent embarqués sur quatre bateaux : le Cap Arcona (le plus gros d’entre eux), le Thielbek, le Deutschland et l’Athen. À l’intérieur des navires, transformés en camps de concentrations flottants, les déportés étant entassés et confrontés à un niveau de mortalité effroyable. André Migdal fut déplacé du Cap Arcona à l’Athen, événement auquel il doit sa survie. Le plan allemand était probablement de torpiller les quatre bâtiments pour faire disparaître tous ces témoins. Le 15 avril, Himmler avait donné l’ordre d’effacer toute trace des camps d’extermination. Mais le 3 mai l’aviation britannique attaqua les navires et coula les trois premiers. L’Athen fut épargné car il avait hissé le drapeau blanc. Les rescapés qui nageaient vers la rive étaient mitraillés par la RAF et les SS. Plus de 7000 déportés furent tués ce jour-là. André Migdal témoignera de la tragédie de Lübeck dans Les Plages de sable rouge.


Rapatrié en France, il accompagna un camarade à Lyon pour témoigner du sort des disparus auprès des familles, puis rentra seul en train à Paris le 25 juin 1945. Il retrouva le 72 rue Claude Decaen. Ses parents, ses frères Henri et Robert, morts à Auschwitz, n’étaient pas revenus, pas plus que les nombreux voisins arrêtés. D’autres membres de la famille avaient également disparu dans les camps. Joseph et Sophie Migdal seront reconnus comme déportés et internés de la résistance (DIR), membres de la résistance intérieure française (RIF) et du mouvement Front national. Ils seront médaillés de la Résistance à titre posthume le 6 juillet 1962 (publication au JO le 10 juillet 1962).


En 1948, André Migdal épousa Jeannine Rodde dont le père, Édouard Rodde, et le grand-père, Jean Rodde, avaient été fusillés au Mont-Valérien le 11 août 1942. Membre du PCF et militant de nombreuses associations de déportés résistants, André Migdal témoigna toute sa vie sur les camps de concentration et le nazisme, en multipliant écrits et interventions publiques, en France et en Allemagne, dans les établissements scolaires et les entreprises. Il fit partie du jury du Prix de la Résistance. Deux jours avant sa mort, il était dans un lycée de Rambouillet avec des élèves.


André Migdal à 80 ans (2004)

Ses "Chants et poèmes concentrationnaires" furent récités et édités par Mouloudji. Sa "Cantate pour la vie" fut mise en musique par Michael Letz, jouée en 1983 à la cathédrale de Brême sous la direction de Maxime Chostakovich (fils du compositeur Dimitri Chostakovitch) et en 2000 à la base sous-marine de Brême, lieu de sa captivité. André Migdal reçut de nombreuses distinctions, parmi lesquelles : Citoyen d’honneur de la ville de Brême, Officier de la Légion d’honneur, Commandeur de l’Ordre national du mérite et Chevalier des Arts et des Lettres. Il fut médaillé de la Résistance, Président de la section de la FNDIRP du 10e arrondissement de Paris et Président du Comité du Souvenir du Camp de Voves.


Décédé le 19 février 2007, il fut inhumé le 26 février au cimetière du Père-Lachaise.


Selon Mémoire des Hommes, le Service historique de la Défense possède des éléments le concernant dans ses archives de de Caen et de Vincennes. Il fut reconnu parmi les déportés et internés de la résistance (DIR), comme membre de la résistance intérieure française (RIF) et du mouvement Front national.


En mai 2009, le wagon du camp d’internement de Voves fut nommé Wagon André Migdal en son hommage.


Œuvre : Poésies d’un autre monde, Seghers, 1975, 158 p. — J’ai vécu les camps de concentration : La Shoah (co-écrit avec Véronique Guillaud, Simone Lagrange et Cristina Szenberg), Bayard jeunesse, 2004, 96 p. ; rééd. 2020. — Chronique de la base : 1943-1945, Auteurs du Monde, 2006 ; rééd. Éditions de Courcelles, 2007, 316 p. — Les Plages de sable rouge : La tragédie de Lübeck, 3 mai 1945, Éditions NM7, 2001, 444 p. — Chants et poèmes concentrationnaires. — Cantate pour la vie.


Sources : SHD Vincennes, GR 16 P 418454 (nc) ; SHD Caen, AC 21 P 598278 (nc). — Livre-Mémorial, Fondation pour la Mémoire de la Déportation. — « Déportation : L’ultime massacre des déportés », l’Humanité, 19 janvier 2002 (en ligne). — « La Mémoire d’André Migdal », l’Humanité, 26 février 2007 (en ligne). — Site des Amis de la Fondation de la Résistance – Mémoires et Espoirs de la Résistance, biographie de l’intéressé par Denis Martin. — Site Mémoire vive, biographie d’Henri Migdal. — Site de l’Amicale de Neuengamme et de ses Kommandos. — Site Match ID, Acte N°215 N, Source INSEE : fichier 2007, ligne n°88272. — Site du Cimetière du Père Lachaise, Amis et Passionnés du Père Lachaise (APPL). — Mémoire des Hommes.


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Passionné d'histoire, j'ai collaboré pendant plusieurs années au Maitron, dictionnaire biographique du mouvement ouvrier - mouvement social.

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