GALDY Georges, Marceau
Né le 10 juillet 1900 à Caveirac (Gard), mort le 3 février 1977 aux Échelles (Savoie) ; chef du personnel à l’usine Verminck de Martigues (Bouches-du-Rhône) ; sympathisant communiste ; résistant ; président du comité local du Front national ; initiateur du Patriote Martiguais, journal du Front national de la commune ; président du Comité de la Résistance de Martigues (équivalent d’un Comité Local de Libération).
Les recensements de la population réalisés en 1901 et 1906 permettent de connaître la composition de la cellule familiale de Georges Galdy à cette époque. En 1901, elle était domiciliée au 2, rue des oliviers, dans le village de Caveirac. Les parents étaient tous deux nés à Montpellier (Hérault). Léonce, Casimir Galdy, le père, était propriétaire cultivateur ; Émilie, Jeanne Masse, la mère, était sans profession ; leur fille, Esther, avait 6 ans ; leur fils, Georges Marceau, était lui âgé de 8 mois. En 1906, la famille vivait à Marseille. Le père était alors employé des tramways. Le couple avait eu un nouvel enfant : Marcel Galdy, qui fut plus tard militant anarchiste et fusillé par l’armée allemande.
La figure de Georges Galdy est intimement liée au Front national de Martigues, à la structuration de la résistance locale à laquelle il contribua largement ainsi qu’à la mise en place du pouvoir municipal d’après-guerre. Créé le 15 mai 1941 par le Parti communiste, le « Front national de lutte pour l’indépendance de la France » visait à rassembler tous ceux qui voulaient s’opposer à Vichy et aux troupes allemandes. A partir de juillet, une intense propagande fut effectuée dans les Bouches-du-Rhône autour de l’étang de Berre. Des comités locaux auraient été créés à partir de mai 1942, puis un comité départemental aurait été mis en place pour les fédérer en septembre 1942, présidé par le communiste Marcel Guizard, alias « Simon ». A Martigues, ce fut à Georges Galdy, chef du personnel à l’usine Verminck, que Paul-Baptistin Lombard fit appel au mois d’octobre pour présider le comité local. Galdy s’était déjà illustré en facilitant le travail de propagande des communistes dans l’usine en leur permettant d’utiliser régulièrement une ronéo. Certains affirmèrent qu’il avait fréquenté l’extrême-gauche dans sa jeunesse. Quoiqu’il en soit, il était connu localement, respecté pour son amabilité, son intelligence et sa droiture. Il donnait au PC l’opportunité précieuse de recruter dans des milieux dans lesquels il était peu représenté (employés de bureau, cadres moyens et supérieurs ou professions libérales). Dans la même perspective de rassemblement, le Parti décida de rattacher les FTP au Front national pour élargir leur recrutement. A Martigues, en décembre 1942, Lombard trouva l’homme idéal en la personne de Maurice Tessé.
Déjà bien structuré au niveau départemental depuis octobre 1942, le Front national renforça ses comités locaux et intensifia sa propagande dont les thèmes recoupaient largement ceux de la propagande communiste : appels à intégrer les FTP, à faire des actions de sabotage, à préparer la "grève générale et patriotique". Néanmoins, afin de toucher les cadres, les professions libérales et la bourgeoisie, on insista davantage sur la collaboration de Vichy, la répression, les arrestations de la Gestapo que sur les salaires et le ravitaillement, en prônant la création d’organisations spécifiques. En juin 1943, un Comité du Front national des juristes diffusait à Aix-en-Provence un tract prouvant l’illégitimité du gouvernement de Vichy d’un point de vue juridique et la trahison que constituait le fait de le servir. Dans le même esprit, les officiers furent invités à se rassembler pour « mettre au service de la patrie leurs connaissances militaires ». A Martigues, Galdy recruta Marthe Roubaud et Marius Caillol, employés de bureau à l’usine Verminck, puis le docteur Contencin, qu’il croisait tous les matins chez le marchand de journaux près du bar des Sports. S’ils y parlaient avant tout d’ésotérisme, en évoquant les nouvelles il en vinrent à partager leurs sentiments à propos de Vichy. En juillet 1943, Paul-Baptistin Lombard mit Galdy en lien avec Max Payssé, dont le patriotisme ne faisait aucun doute. Georges Galdy demanda à ce dernier d’être exclusivement en contact avec lui pour se consacrer pleinement à la préparation de l’administration de la ville à la Libération. Avec ces premières recrues Galdy commença une propagande par tracts. Un responsable venait de Marseille à vélo pour en apporter certains contenant des directives. D’autres étaient rédigés sur place dans un cabanon appartenant à un Italien, sur la colline de Ferrières, derrière la chapelle de la Vierge. Georges Galdy y avait installé une machine à écrire et une ronéo. D’après Marius Caillol, ils y imprimaient des tracts appelant à résister aux Allemands. Paul-Baptistin Lombard y participait une fois par semaine ou tous les quinze jours, informant les nouveaux des consignes de sécurité.
A la fin de l’année 1943, le groupe recruta Albert Long, chef-comptable aux Établissements Maritimes de Caronte, ainsi que deux hommes d’église, le Révérend Père André J., curé de Ferrières, et l’abbé Jaume, tous deux en rupture avec le pétainisme de la hiérarchie catholique. Le Front national mit dans les boîtes aux lettres des collaborateurs de Martigues de petits cercueil, les avertissant de ce qui les attendait s’ils ne changeaient pas de camp. A la même période, le remplacement de Marcel Guizard par Pierre Brandon, alias "Balzac" à la tête du Front national des Bouches-du-Rhône, fournit l’occasion de publier un journal imprimé, un projet cher à Brandon. Mis en contact avec l’imprimeur aixois Eugène Tournel, les deux hommes planifièrent la sortie du premier numéro de La Marseillaise, "organe du Front national des Bouches-du-Rhône". Informé lors d’un passage de Brandon à Martigues fin novembre, Georges Galdy lui demanda d’imprimer par la même occasion le journal local du Front national. C’est ainsi que le numéro 1 de La Marseillaise du 1er novembre 1943 annonça celui du Patriote Martiguais. Ce dernier fut tiré en janvier 1944 à 1500 exemplaires, en même temps que le numéro 2 de La Marseillaise. Le nouveau journal se posa en journal des patriotes et l’organe « qui transmettra fidèlement les mots d’ordre du Conseil national de la Résistance ».Début 1944, Brandon demanda à son tour de l’aide à Galdy pour lui procurer deux uniformes allemands pour les FTP-MOI de Marseille. Ces derniers planifiaient une évasion des prisonniers FTP de la prison Chave, Si les versions divergent sur la manière dont les uniformes furent obtenus, Maria Albini, collaboratrice de Brandon, et Louis Vallauri participèrent au transport de ces uniformes à travers Marseille. L’évasion collective qui suivit laissa néanmoins les résistants anarchistes André Arru et Étienne Chauvet en prison parce que non communistes.
En mars 1944 parut un second et dernier numéro du Patriote Martiguais, avant que la Gestapo ne trouvât l’endroit où était tirée La Marseillaise. Tournel, l’imprimeur eut heureusement le temps de s’enfuir. Ce numéro tentait de convaincre les attentistes de s’engager et annonçait la création d’une section féminine du Front national. L’aide aux réfractaires et aux FTP se poursuivait. Le premier numéro de La Marseillaise annonça qu’à l’usine Verminck, bastion de Galdy, la grève avait été totale le le 11 novembre 1943. Les MUR continuaient de verser le produit de leurs collectes aux Front national et, grâce à la popularité de leurs actions, les rangs des FTP grossissaient de tous les réfractaires qui le rejoignaient. Le 8 juin 1944, Galdy ne vint pas à la réunion des MUR prévue chez Robert Daugey au 1, traverse Hoche (aujourd’hui rue Robert Daugey). Ce rendez-vous scella en effet l’arrestation des instituteurs Paul Di Lorto, Lucien Toulmond et Henri Tranchier, de Barthélémy Abbadie, cultivateur de 24 ans de Pas-des-Lanciers, de Joseph Barthélémy et de Fernand « Hali », un ami de Daugey, présent par hasard.Les MUR attendaient ce jour-là une livraison d’armes pour prendre le maquis. Mais les représentants de trois organisations résistantes, Paul-Baptistin Lombard pour le PCF, Marius Arnaud pour les FTP et Georges Galdy pour le Front national, mis au courant, étaient en profond désaccord avec l’idée de prendre le maquis dans une zone sans reliefs élevés ni forêts et à forte présence allemande. Ces derniers se rendirent à la réunion pour exposer aux MUR leur préférence pour les actions de guérilla suivies de dispersions dans la population. La Gestapo venant arrêter Daugey fit un colossal coup de filet, démembrant la résistance martégale. Informé à temps du danger, Georges Galdy alla se cacher à Sausset-les-Pins. Dona Spinosa et Clément Bresson, chargés de livrer les armes, s’échappèrent en courant chacun de leur côté. A part Fernand « Hali » qui fut libéré quelques jours plus tard parce qu’il avait arrêté par erreur, tous les autres furent tués par les Allemands.
Une fois que les autorités de Vichy furent chassées, le gouvernement provisoire d’Alger nomma douze Commissaires régionaux de la République et des préfets. Le 24 août, Raymond Aubrac prit ses fonctions de Commissaire régional et le 25, Flavien Veyren celles de préfet. Parallèlement à ces autorités légales, on nomma des autorités de fait, Comités de Libération, régionaux, départementaux ou locaux, composés de résistants ayant libéré leur territoire. Le Conseil National de la Résistance (CNR) avait obtenu de de Gaulle que les comités départementaux et locaux puissent légitimement coordonner l’action clandestine immédiate, diriger la phase finale de l’insurrection de libération et représenter provisoirement la population. Les Comités devaient être constitués d’un représentant de chaque composante de la Résistance existant à la fois dans le CNR et dans le département ou la ville. Du 21 au 27 août 1944, les décisions prises à Martigues le furent par un Comité de Résistance, équivalent d’un Comité Local de Libération, présidé par Georges Galdy, responsable du Front national, qui s’installa près de la mairie. Le commissaire de police Marcelli, au nom des MUR, se plaignit de la représentation insuffisante de son groupe. Le Front national avait anticipé longtemps avant la Libération puisque Galdy avait chargé Max Payssé depuis l’été 1943 de préparer l’administration de la cité. Le Parti communiste ayant créé autour de lui de nombreuses organisation de résistance, le Parti radical et la SFIO, qui n’en avaient pas fait autant, se sentaient lésés par la sur-représentation des communistes qui étaient minoritaires avant la guerre.
Le 28 août, un Comité d’Administration Provisoire (CAP) siégea pour la première fois, présidé par Max Payssé (Front national, non communiste). Au terme de discussions animées il fut convenu qu’il serait composé de quatre membres par organisation pour le Front national, le PCF, la CGT et les FUJP, et que les MUR désigneraient quatre personnes plus un « modéré ». Toutefois, le préfet refusa la composition du CAP. Le Comité Départemental de Libération, présidé par Francis Leenhart et Max Juvenal et à majorité MUR et socialiste, voulait que les socialistes y soient plus nombreux. Des négociations durèrent plusieurs semaines, aidées par le fait que le préfet et Georges Galdy étaient des amis d’enfance. Il fut décidé de créer une structure supplémentaire : une Délégation spéciale de 19 membres présidée par Albert Long (Front national, non communiste), composée d’à peu près les mêmes personnes que le CAP avec trois socialistes en plus. Cette Délégation spéciale ratifia les décisions du CAP et on data sa création du 21 août. La ville fut donc administrée en accord avec le préfet, Max Payssé continuant à assumer sa fonction comme secrétaire général de mairie. En décembre 1944, Georges Galdy présida la réunion préparatoire des ouvriers, employés, techniciens et fonctionnaires en vue d’une assemblée patriotique. Il interrogea la population sur la meilleure manière d’appliquer le programme du CNR, sur la reconstruction de la France et l’épuration. Il informa que les doléances concernant la nation seraient transmises tandis que les locales devaient être réalisées par la municipalité.
Galdy eut un rôle de premier plan lors de l’assemblée patriotique du 10 décembre, présidée par un certain Labiche. Galdy et Labiche signalèrent aux Martégaux présents que la population n’avait pas saisi l’importance de venir à cette réunion. Georges Galdy demanda au public de nommer une commission composée de représentants des différents mouvements et corporations de la ville, chargée de résumer toutes les doléances de la population dans un cahier prévu pour être transmis successivement à la mairie, au Comité Départemental de Libération et à Paris. Il retraça l’historique du Comité de Libération, formé à partir du Comité de Résistance, créé dans la clandestinité et regroupant tous les mouvements reconnus officiellement par le CNR. Au moment de l’assemblée, le Comité de Libération comprenait : Georges Galdy, chef du personnel (Front national), M. André, instituteur (MUR), Gabriel Mouttet, ouvrier (PCF), Théodore Boyer (SFIO), Honoré Orlandini, ouvrier (Socialiste indépendant), Albert Castanié, ingénieur (FUJP), Rina Meli, ménagère (UFF), Marcel Olive (CGT). L’assemblée critiqua la manière dont se passaient habituellement les élections dans le pays : les députés et conseillers municipaux mettaient en avant un programme avant les élections qu’ils changeaient totalement une fois élus, en se laissant influencer par ce qui se passait au Parlement. Labiche préconisa que tout candidat à un poste de conseiller municipal ou de député signât avant même d’être élu une fiche de démission. En cas de renoncement à son programmé, il serait "considéré d’office comme démissionnaire". Il encouragea les électeurs à suivre dans les journaux ce qui se passait dans les municipalités et au Parlement.Galdy interrogea le capitaine Marcel Reimbert (envoyé à Martigues en mai 1944 par le réseau de résistance Marco-Polo), sur ce que l’on pensait "à Paris" des "Comités de Résistance transformés en Comités départementaux de libération, de leur rôle, de leur constitution et pouvoirs légaux". Reimbert évoqua la rivalité entre les Comités de Libération et "bien des hommes qui sont dans les ministères" qui "sabotent et essaient par tous les moyens de détruire l’esprit et la force de la Résistance". Il faisait ici allusion à l’hostilité de de Gaulle au pouvoir des Comités, auxquels il préférait les hommes sortis des grandes écoles, issus de la bourgeoisie, qu’il avait mis à des postes clefs.
Avec l’hiver revinrent à Martigues les difficultés du ravitaillement alimentaire. La distribution des rations américaines ne remplacèrent qu’en partie la diminution des rations de viande. Quant au poisson pêché, il était majoritairement envoyé vers d’autres communes par le Ravitaillement général. En février 1945, comme aucune viande n’avait été distribuée depuis deux semaines, une soixantaine de ménagères manifestèrent devant la criée. Georges Galdy fit distribuer quatre-vingt kilos de poisson. Néanmoins, le chef de district de Ravitaillement dut s’expliquer le lendemain à la Bourse du travail devant un rassemblement de deux cents ménagères, qui créèrent un Comité permanent. En avril 1945 eut lieu le premier tour des élections municipales. La Liste unique regroupant Front national, UFF, CGT, FUJP, PCF, syndicat agricole, syndicat des pêcheurs, un socialiste indépendant (Honoré Orlandini), chambre des métiers et artisans, anciens combattants, prisonniers de guerre et déportés, l’emporta sur celle présentée par le Parti socialiste (SFIO).
Il semble que le rôle politique de Georges Galdy devint par la suite plus discret.
Sources : Jacky Rabatel, Une ville du Midi sous l’Occupation : Martigues, 1939-1945, Centre de Développement Artistique et Culturel, 1986 (pp. 156-157, 220, 222, 223 [photographie], 250, 252, 269-270, 301-306, 313, 316, 353, 355-357). — Dénombrement de 1901, Département du Gard, Arrondissement de Nîmes, Canton de Saint-Mamert, Commune de Caveirac. — Recensement de la population de Marseille de 1906 (site Filae). — Site Généanet.
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