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Sébastien Avy / Renaud Poulain-Argiolas

CHABANY Charles [CHABANY Camille, Charles]

[Cette biographie s'inspire d'un texte originellement écrit par Louis Botella. 

Je l'ai complété avec Sébastien Avy, en mettant en gras nos propres apports pour pouvoir les distinguer.]


Né le 14 mars 1905 à Bollène (Vaucluse), mort le 5 mai 2000 à Martigues (Bouches-du-Rhône) ; surveillant au service électrique des chemins de fer, puis électricien ; militant communiste du Gard ; secrétaire général du syndicat CGT des cheminots de L’Ardoise (aujourd’hui Laudun-l’Ardoise, Gard) ; puis militant communiste à Miramas (Bouches-du-Rhône) ; révoqué de la SNCF en 1940 ; résistant des Francs-Tireurs et Partisans français, chef du 2e groupe de la 13e compagnie du 3e sous-secteur R2 (Miramas) ; président du Comité local de Libération de Miramas, président de la Délégation municipale spéciale, puis conseiller municipal ; rompit avec le PCF ou en fut exclu vers 1947.


Charles Chabany était le fils de Camille, Cyprien Chabany, né à Gourdon (Ardèche), cultivateur, et de Berthe, Félicienne Fauchet, née à Bollène. Son père fut mobilisé pour la Première guerre mondiale avant d’être détaché aux "Établissements A. Valabrègue, Société de produits réfractaires", à Bollène. C’est à Bollène que Charles Chabany épousa le 5 décembre 1925 Marie-Thérèse Mathieu. Ils eurent ensemble un fils nommé Charly en 1937.


À partir d’au moins mai 1935, il fut le secrétaire de la cellule du Parti communiste de Pont-Saint-Esprit (Gard). Employé en gare de Pont-Saint-Esprit, Charles Chabany fut élu ou réélu, lors de l’assemblée générale du 16 janvier 1937, secrétaire général du syndicat CGT des cheminots de L’Ardoise (aujourd’hui Laudun-l’Ardoise). Lors de l’assemblée générale suivante, tenue le 6 mars de l’année d’après, il fut reconduit dans cette fonction. En 1936, il vivait au 21 avenue Gaston Doumergue à Pont-Saint-Esprit avec sa femme et sa belle-mère, Thérèse, veuve Mathieu. D’après les registres du recensement de la population, il était alors électricien à PLM. 


En octobre 1938, il habitait la ville cheminote de Miramas (Bouches-du-Rhône). La suite de son parcours est liée à ce département. Il apparaissait alors en tant que Camille Chabany, aide-surveillant au service électrique, sur la liste des candidats présentés par la CGT lors de l’élection des délégués titulaires auprès du chef de l’arrondissement Voie de Marseille du réseau Sud-est de la SNCF.


Le 23 mai 1940, le sous-préfet d’Aix-en-Provence écrivit au préfet des Bouches-du-Rhône pour demander une enquête de la Police spéciale sur trois cheminots communistes : Chabany [qu’il nommait Louis], "surveillant au service d’électricité" et qualifié de "communiste notoire", Clavel, "chef de train", et Viany, "retraité". Dans une lettre adressée le même jour au capitaine de gendarmerie de Salon-de-Provence, le sous-préfet citait également Graugnard, lui aussi cheminot, qui aurait fait comme les autres de la "propagande communiste", ainsi qu’Isidore Blanc, l’ancien maire communiste déchu en 1940. Il était demandé que leur surveillance fût redoublée.


Le jugement de Chabany vu par la presse. Paru dans L’Éclair le 3 mai 1941

Charles Chabany fut révoqué de la SNCF. D’après les informations qu’il donna dans son dossier d’homologation de services en 1948, il fut arrêté le 15 novembre 1940. Il fut jugé le 2 mai 1941 par le Tribunal militaire de la XVe région à Marseille lors du procès de cinquante personnes accusées d’activité communiste. Selon les versions divergentes de journaux régionaux de l’époque, 24 ou 26 d’entre eux auraient été condamnés, parmi lesquels Jean Andreani, Pierre Laffaurie, Claire Oldani, Louis Curnier, Edmond Reynaud, Covo Bonfils, Louis Gazagnaire, Marie Emmanuelli et Antoine Lo Basso. Chabany écopa d’une peine de six mois de prison. Il ne précisa pas où avait eu lieu sa détention. Sa peine dut être alourdie, car il fut libéré le 15 décembre 1943. Il fut alors actif dans les FTPF, sous les ordres du lieutenant Bouchet pour le secteur de Miramas jusqu’au 31 août 1944. Il était chef du 2e groupe de la 13e compagnie du 3e sous-secteur R2, avec pour pseudonyme « Bernard ». Nommé sergent en janvier 1944 par le commandant Le Lambert (Lapina), il participa au sabotage de voies ferrées et d’installations militaires allemandes dans la région ainsi qu’aux combats de la Libération.


En date du 4 septembre 1944, Charles Chabany était président du Comité local de Libération (CLL) de Miramas. Un rapport du sous-préfet d’Aix daté du 6 septembre commentait : « À Miramas, une municipalité dont la presque totalité est PCF a éliminé les éléments d’autres origines du comité de Libération. » En effet, les membres du comité qui n’apparaissaient pas sous l’étiquette PCF étaient tous membres d’organisations d’obédience communiste : de la CGT, du Front national de lutte pour la libération, de mouvements liés au parti. Les seuls qui étaient présentés comme appartenant à une structure non-communiste, le MLN (Mouvement de Libération Nationale), étaient également des militants communistes connus localement : Georges Clavel, Fernand Julien et Pierre Massotier, conseillers municipaux au temps du Front populaire et déchus en 1940. Charles Chabany présida de plus la Délégation municipale spéciale, nommée le 21 août 1944 par le préfet sur la proposition du CLL pour remplacer le conseil municipal désigné par Vichy. À la différence du CLL, la délégation municipale ne comprenait pas exclusivement des communistes ou alliés. On y trouvait plusieurs résistants sans parti, dont Henri Coste (qui s’allia plus tard au MRP et fut maire SFIO de la ville de 1958 à 1965).


Lors des élections municipales de 1945, Charles Chabany était candidat sur la Liste d’Union Républicaine Antifasciste (URA) qui s’opposa à une liste SFIO. La liste URA regroupait des organisations et personnalités liées au PCF, dont 10 candidats présentés au nom du parti, 4 pour l’UFF, 4 pour le Front national, 4 pour la CGT et 1 pour l’ARAC (il s’agit de Pierre Massotier). Se déroulant avant la capitulation allemande, ces élections visaient à consolider rapidement l’ordre public. L’intégralité de la liste fut élue dès le premier tour du 29 avril 1945. Chabany obtint 1 586 voix sur l’ensemble de la commune sur 2 663 suffrages exprimés, ce qui le plaçait en 12e position de sa liste. Isidore Blanc devint le nouveau maire. Le mandat de Chabany au conseil municipal de Miramas durait jusqu’au 26 octobre 1947, date des premières élections municipales de la IVe République.


Plusieurs témoignages indirects suggèrent qu’il aurait pu avoir un conflit avec Isidore Blanc, Chabany ayant un rôle important dans la Résistance et central à la Libération, tandis que Blanc aurait voulu reprendre la place qu’il avait eue avant-guerre. Cela expliquerait la disparition de Chabany des listes présentées par le PCF dans la commune à partir de 1947. Louis Deluy, élu communiste qui vécut de l’intérieur la période de la municipalité Blanc, évitait le sujet de Chabany quand on l’interrogeait, se contentant de le qualifier de "traître". Aurait-il été exclu ?


En octobre 1948 il fut homologué FFI pour la période correspondant à son engagement dans les FTP, Il était alors domicilié 12 route d’Arles à Miramas. Son rôle dans la Résistance avait été attesté par Adolphe Lapina, chef militaire FTPF du secteur Nord R2 des Bouches-du-Rhône en octobre 1944. Le 30 janvier 1952, Charles Chabany fut interrogé par la brigade de gendarmerie de Miramas dans le cadre d’une enquête portant sur les circonstances de la disparition de Maurice Tessé dans la commune en février 1944. Il déclara avoir "parfaitement connu" le chef FTP martégal, précisant que celui-ci n’avait pas d’activité clandestine dans le secteur de Miramas en dehors des événements qui l’avaient conduit à y trouver la mort. À cette date Chabany vivait aux Cités Capitaine, n°17.


Il quitta Miramas par la suite pour s’installer à Martigues et aurait pris des distances avec le Parti communiste.


Sources : Arch. Dép. Ardèche, État signalétique de Chabany Camille, Cyprien, Classe 1894, matricule 1000. — Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, 9 W 35 ; 9 W 53 ; 41 W 314 ; 41 W 320 ; 107 W 75 ; 142 W 6. — Arch. Dép. Gard, Listes nominatives de recensement de population, Pont-Saint-Esprit, 1936, 6 M 300. — SHD Vincennes, GR 16 P 115679. — Dossier TESSÉ Maurice au SHD Vincennes, GR 16 P 565690. Le Cri du Gard, organe régional hebdomadaire du Parti communiste, 4 et 25 mai 1935 (BNF Gallica). — Le Cheminot du PLM, organe de l’Union de syndicats du PLM puis du Sud-est, 25 février, 25 septembre 1937, 25 avril 1938 (Institut d’histoire sociale de la Fédération CGT des cheminots). — Le Cheminot syndicaliste, organe de l’Union des syndicats CGT de cheminots du PLM puis du Sud-est, 10 octobre 1938 (Institut d’histoire sociale de la Fédération CGT des cheminots). — « Cinquante communistes jugés par le Tribunal militaire de la XVe région », L’Éclair, 3 mai 1941. — « 26 communistes condamnés par le Tribunal militaire », Le Petit Marseillais, 3 mai 1941. — Site Match ID, Acte n°210 N, Source INSEE : fichier 2000, ligne n°214854.


Version au 7 septembre 2022.

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Passionné d'histoire, j'ai collaboré pendant plusieurs années au Maitron, dictionnaire biographique du mouvement ouvrier - mouvement social.

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