SAVOYE Fernand, Ernest
Dernière mise à jour : 29 avr.
Né le 12 décembre 1903 à Ozoir-la-Ferrière (Seine-et-Marne), mort en déportation le 1er novembre 1942 à Auschwitz (Pologne) ; garçon de bureau, puis électricien ; militant communiste ; syndicaliste CGT ; déporté.
Fernand Savoye était le fils d’Arthur Savoye, âgé de 35 ans, charretier à Coulommiers, et d’Henriette, Bellonie Renvier, 35 ans elle aussi, qui fut un temps blanchisseuse. Il vit le jour chez son grand-père maternel, Edouard, Augustin Renvier à Ozoir-la-Ferrière. Ses parents, domiciliés à Paris au 92 rue des Marais, avaient eu deux autres enfants : Lucien, Arthur, né en 1892, et Alice, Henriette, née en 1894.
Selon l’historienne Claudine Cardon-Hamet, Fernand Savoye avait "une éducation primaire développée". Il avait une cicatrice à la joue droite. Il était garçon de bureau au Comptoir National d’Escompte de Paris, situé 14 rue Bergère (IXe arr.). Le 8 mai 1926, il se maria avec Charlotte, Louise Wagner, née à Paris (XIXe arr.), au Pré-Saint-Gervais (Seine, Seine-Saint-Denis). Le couple eut deux filles : Jeannine, née le 15 juillet 1929 et Ginette, née le 31 mars 1935. Charlotte Savoye travaillait comme concierge à l’École Fraternité-Aubin, appelée aussi École des Grands-Champs, à Romainville (Seine-Saint-Denis). À ce titre, elle disposait d’un logement de fonction qu’elle occupa avec son mari, 79 rue de la Fraternité. En 1934, ils emménagèrent dans un pavillon au 69 rue Jean Jaurès. D’après les listes électorales, Fernand Savoye était alors électricien. Il était connu des services de police en tant que militant communiste. Il était également syndiqué à la CGT. Son père, employé comme camionneur, vivait au n°64 de la même rue ; il travailla pour l’entreprise Maggi, livrant des bidons de lait chez les commerçants de Romainville. Sa femme Charlotte travailla comme femme de ménage au Comptoir National d’Escompte.
Après la déclaration de guerre, Fernand Savoye fut mobilisé pour partir au front. Il participa aux réunions clandestines du Parti communiste ayant lieu dans la rue Jean Jaurès et diffusa l’Humanité interdite. Dans un entretien de mars 2022, sa fille Jeannine se souvenait de l’énorme portrait de Marcel Cachin trônant dans le jardin de leur logement de l’époque et d’avoir vendu le journal avec son père à plusieurs reprises. Des réunions du parti avaient lieu dans leur sous-sol, ce qui causait parfois des accrochages entre les époux Savoye. En réaction à l’intense activité de propagande communiste dans l’est parisien (inscriptions sur les murs et distributions de tracts), la police de Vichy renforça la surveillance des militants connus avant la guerre.
Fernand Savoye fut arrêté le 26 juin 1941 à son domicile, en présence de sa femme, de ses parents et de ses enfants, sur indication des Renseignements généraux et dans le cadre d’une grande rafle visant syndicalistes et communistes. En partant il dit à ses filles pour les rassurer qu’il ne s’absenterait pas longtemps. Dans la liste des RG, Fernand Savoye était mentionné comme "meneur particulièrement actif". Cette rafle faisait suite à l’Aktion Theoderich, l’attaque de l’Union soviétique par l’Allemagne nazie le 22 juin. Plus de mille communistes furent ainsi arrêtés en zone occupée avec l’aide de la police française et envoyés au camp d’internement de Royallieu à Compiègne (Oise), Frontstalag 122, administré par la Wehrmacht. On attribua à Fernand Savoye le matricule 226. Tombé malade, on l’envoya pour un temps à l’hôpital du Val-de-Grâce. Il passa du temps à peindre. Son frère Lucien Savoye, syndicaliste CGT, aida sa belle-sœur à faire des démarches afin de pouvoir lui rendre visite et pour écrire à Pétain. Elle aurait écrit plusieurs courriers au maréchal. La famille obtint l’autorisation de voir Fernand Savoye une semaine sur deux, mais ses filles y allaient toutes les semaines, bénéficiant de la gentillesse de certains soldats allemands. Jeannine Savoye dit avoir vu son père pour la dernière fois avec sa mère le jour de leur anniversaire de mariage, à Compiègne, le 8 mai 1942.
Le 6 juillet 1942 à l’aube, Fernand Savoye fut conduit à pied et sous escorte allemande avec d’autres prisonniers à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny. Ils furent entassés dans des wagons de marchandises. Le train partit à 9 h 30, une fois les portes verrouillées. Le convoi I. 42, dit "convoi des 45 000", à destination d’Auschwitz, transportait 1175 hommes, dont la majorité étaient des communistes ou considérés comme tels, ouvriers le plus souvent et généralement membres de la CGT. C’était un convoi de représailles formé pour dissuader les dirigeants et militants communistes de continuer la guérilla urbaine contre les troupes d’occupation. Les otages présents dans ce transport avaient été choisis dans chaque département de la zone occupée par les Feldkommandant, selon les directives du Commandant militaire en France et les renseignements fournis par les autorités françaises. Le trajet dura deux jours et demi. Comme ils n’étaient pas ravitaillés en eau, les déportés souffrirent principalement de la soif.
Enregistré au camp le 8 juillet, Fernand Savoye reçut le matricule 46098. Sa photo d’immatriculation à Auschwitz fut retrouvée au nombre de celles que la résistance intérieure du camp avait cachées aux SS, qui avaient l’ordre de les détruire avant l’évacuation. Il passa la nuit au Block 13 avec tous les déportés du convoi, entassés dans deux pièces. Le lendemain, les hommes furent conduits à pied au camp annexe de Birkenau situé à quatre kilomètres et répartis dans les Blocks 19 et 20. Le 10 juillet, après l’appel général et un court interrogatoire, ils furent répartis dans différents Kommandos pour travailler. Le 13 juillet, après l’appel du soir, la moitié des membres de son convoi fut ramenée au camp principal (Auschwitz-I). On ignore toutefois dans quelle partie du complexe il fut affecté.
Fernand Savoye mourut à Auschwitz le 1er novembre 1942, d’après le certificat de décès établi au camp. L’état civil d’Ozoir-la-Ferrière a retenu la date du 6 juillet 1942 à Fresnes, qui est en réalité le moment de sa disparition du territoire français.
Son nom figure sur une des plaques commémoratives apposées dans le hall de la mairie de Romainville avec la mention "mort dans la résistance".
Les archives du Service historique de la Défense de Caen possèdent des éléments sur lui relatifs à sa déportation. Celles de Vincennes disposent de documents en lien avec son action dans la résistance, quoiqu’on lui attribue 1908 comme année de naissance (même état civil, mêmes jour et lieu de naissance). Un homonyme (sans date ni lieu de naissance) est également présent à une autre cote.
Sa fille Jeannine Savoye, épouse Bartoli, fut présidente d’une association de Chauconin-Neufmontiers (Seine-et-Marne). Elle accompagna plusieurs visites scolaires d’adolescents de la commune au camp de Compiègne.
Sources : SHD Vincennes, GR 16 P 538221 (nc) ; pour l’homonyme : GR 16 P 538220 (nc) ; SHD Caen, AC 21 P 536178 (nc). — Arch. Dép. Seine-et-Marne, État civil d’Ozoir-la-Ferrière, Naissances, mariages, décès 1900-1906, 1903, Acte n°45, 6E368/16 (plus un Avis de mention de décès, Romainville le 31 juillet 1952). — Notice biographique par Claudine Cardon-Hamet sur le site Déportés politiques à Auschwitz. — Notice biographique sur le site Mémoire vive. — Livre-Mémorial, Fondation pour la Mémoire de la Déportation. — Données du site Filae. — Site Généanet. — Propos recueillis auprès de sa fille Jeannine Bartoli, née Savoye (mars et mai 2022).
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