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Renaud Poulain-Argiolas

BUONAMINI Achille [né BUONAMINI Pompillo, Alcide, Romeo, dit Achille]

Né le 4 juin 1910 à Port-de-Bouc (Bouches-du-Rhône), mort le 22 mars 1978 à Port-de-Bouc ; chanfreineur-riveur ; militant communiste de Port-de-Bouc.


Son prénom varie selon les sources : l’administration l’appelle Pompillo, parfois Pompilio, lui-même signe Pompillio dans un document, mais sa famille et parfois les autorités le nomment "Achille". Son jour de naissance fait lui aussi l’objet de variations : quand le site Match ID (données de l’INSEE) indique le 3 juin 1910, sa mère et lui donnent le 4 juin. La source familiale a été considérée comme fiable.


Achille Buonamini était le quatrième enfant d’Oreste Buonamini, né en 1875 à Lari (province de Pise) en Toscane (Italie), riveur aux Chantiers et Ateliers de Provence de Port-de-Bouc, et de Giovanna, née Biondi en 1876, originaire de Pomarance, dans la même province d’Italie, sans profession. En 1911, la famille Buonamini était domiciliée à Port-de-Bouc au 21 rue Marceau, dans le quartier de la Lèque. Vivaient au foyer Oreste, son épouse Giovanna ("Jeanne") et leurs enfants : Orsolina ("Ursule"), née en 1903 à Port-de-Bouc ; Silvaine, née en 1906 à Lari ; Varo, né en 1908 à Port-de-Bouc ; et Achille. Le couple eut encore un fils, Luigi, en 1913, et une fille, Magdeleine, en 1917.


Les frères d’Achille Buonamini furent connus à Port-de-Bouc pour leur engagement politique : Varo en tant que candidat sur la liste du Bloc ouvrier et paysan, présenté par le PCF aux élections municipales de 1935, et Luigi comme militant du Parti communiste à partir de 1936.


Achille Buonamini devint citoyen français le 20 novembre 1930 par sa participation volontaire aux opérations de recrutement militaire. Selon un rapport du préfet des Bouches-du-Rhône du 27 juin 1941, il fut de 1936 à 1939 "membre actif du Parti communiste", pour lequel il fit "une propagande intensive".

Au moment de son appel sous les drapeaux, il fut versé dans le service auxiliaire et maintenu dans cette position par la commission de réforme de Marseille le 21 décembre 1939. Appelé le 17 avril 1940, on l’affecta au dépôt du 215e régiment d’artillerie, 104e Batterie, à Nice. Il rentra le 17 mai à la 5e compagnie du 215e, au parc d’artillerie de Marseille, et fut démobilisé le 25 juillet.


En 1942, il était domicilié 84 rue Marceau et marié à Josephe Felices, née en Algérie, avec qui il avait trois enfants : Jean en 1937, Henri en 1938, Alain en 1940. Le couple eut trois autres fils par la suite : Robert, José et René. Comme son père, Achille Buonamini travaillait aux Chantiers et Ateliers de Provence. Il y était chanfreineur-riveur.


La préfecture des Bouches-du-Rhône, qui le surveillait, demanda au ministère de la Justice du gouvernement de Vichy de lancer à son encontre une procédure de dénaturalisation selon les dispositions de la loi du 22 juillet 1940. Son dossier précise : "Fréquente certains milieux, foyers extrémistes", mais aussi : "il est susceptible de participer à la reconstitution de ce parti [le PCF] dissous". La commission de révision des naturalisations optant pour le retrait, il perdit le statut de français par décret le 12 février 1942 (annonce au JO le 16 février).


Le 2 avril 1942, Roger Marcelli, commissaire de police de Port-de-Bouc et membre des Mouvement unis de la Résistance, agissant selon les instructions du sous-préfet d’Aix, informa Buonamini de sa dénaturalisation. Dans les jours qui suivirent, ce dernier fit une demande de recours gracieux en écrivant au ministère de l’Intérieur. Voulant donner des gages de son attachement à la France, il y évoquait ses parents italiens vivant en France depuis 1900, sa sœur aînée mariée avec un Français, son engagement militaire et celui de ses frères, jusqu’à leur mobilisation contre l’Allemagne, l’aîné étant Croix de Guerre et prisonnier du Reich. Il déclarait travailler depuis plus de dix ans aux Chantiers et Ateliers de Provence et concédait avoir appartenu au Parti communiste, quoiqu’"avec toute la jeunesse de la ville" en 1936 en ajoutant qu’il n’était plus militant depuis la guerre. Il commentait le sort qui lui avait été fait : "Voilà trois mois j’ai été arrêté avec plusieurs jeunes gens de la région pour cette raison, l’on m’a libéré 48 heures après, donc reconnu non coupable. Ce n’est pas pour cela que l’ont doit me frapper d’une mesure si dure." Pour finir, il invitait les "ministres" à enquêter et concluait sur un ton patriotique : "je tiens moi à rester français et que mes trois fils [soient] français, mes parents ont adopté la France voilà 42 ans, quand elle était forte, il n’y a pas de raison que l’on chasse ses fils, maintenant qu’elle a besoin de tous ses enfants." Il faut comprendre que perdre la nationalité française signifiait ne plus avoir le droit de travailler et, pour un communiste, être expulsable par Vichy vers l’Italie fasciste.


Sa sœur, Orsolina Buonamini, épouse Larrieu, domiciliée à Toulouse, adressa plusieurs lettres au Maréchal Pétain pour lui demander de corriger ce qu’elle considérait comme une injustice faite à son frère, avec des arguments identiques à ceux développés par celui-ci. Elle terminait sa première missive par "Je n’ai plus [foi] qu’en vous.". Leur mère écrivit elle aussi une lettre à Pétain, sans plus de succès, ajoutant une dimension affective : "J’attends Monsieur le Maréchal votre décision avant d’aviser mon fils aîné dans son stalag." Achille Buonamini s’adressa enfin au garde des Sceaux en juillet 1942 afin de solliciter son intervention, sa dénaturalisation ne pouvant être selon lui que le fruit d’"un malentendu ou d’une erreur". Son recours gracieux fut rejeté en septembre 1942. Il en fut informé six mois plus tard.


On perd la trace d’Achille Buonamini par la suite et on ignore s’il fut encore militant. Le 24 mai 1944, le Comité français de libération nationale abrogea la loi de dénaturalisation appliquée par Vichy. Il retrouva donc de fait la nationalité française.


Sources : Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, Recensement de la population de Port-de-Bouc, 1911, 6 M 453. — Archives nationales en ligne, BB/27/1422-BB/27/1445 (dénaturalisés de Vichy : lettres A à C). — Site Généanet. — Site Match ID, Acte n°23 N, Source INSEE : fichier 1978, ligne n°42623.


Version au 22 décembre 2023.

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Passionné d'histoire, j'ai collaboré pendant plusieurs années au Maitron, dictionnaire biographique du mouvement ouvrier - mouvement social.

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