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Sébastien Avy / Renaud Poulain-Argiolas

LIGÉ Jean, Paul, Aimé

[Cette biographie s'inspire d'un texte originellement écrit par Jean-Pierre Bonnet. Je l'ai complété avec Sébastien Avy, en mettant en gras nos propres apports pour pouvoir les distinguer.]


Jean Ligé à Marseille, novembre 1948 [photo fournie par Frédéric Ligé]

Né le 16 janvier 1910 à Montpellier (Hérault), mort le 29 octobre 1990 à Avignon (Vaucluse) ; visiteur de gare, révoqué en 1947, puis docker et maçon ; syndicaliste CGT ; membre de la CGT clandestine sous l’Occupation ; secrétaire général du syndicat CGT des cheminots de Miramas après la guerre, secrétaire de l’Union Locale et membre de la commission administrative de l’Union départementale des Bouches-du-Rhône ; militant communiste de Miramas (Bouches-du-Rhône), conseiller municipal (1945-1947) puis adjoint (1947-1953) de la municipalité Isidore Blanc.


Le père de Jean Ligé était Henri, Jules Ligé, plâtrier, né à Montpellier ; sa mère, Céleste, Augustine Malavialle, sans profession, était née à Constantine (Algérie).


Habile de ses mains, Jean Ligé travailla d’abord comme apprenti chez un horloger. Entré à la SNCF le 16 février 1937, il adhéra alors à la CGT. Mobilisé après la déclaration de guerre, il fut pris, selon son fils Frédéric, dans le naufrage du torpilleur La Bourrasque, qui coula au large de Dunkerque le 30 mai 1940. L’événement faisait suite à l’évacuation des soldats alliés de cette ville, coupés de leurs arrières par l’armée allemande pendant la bataille de Dunkerque. La Bourrasque transportait à son bord 700 soldats évacués vers Douvres. L’origine du naufrage resta non élucidée, relevant soit d’un obus allemand (hypothèse jugée peu probable) soit de la collision avec une mine française ayant dérivé. Une partie des soldats fut repêchée par un autre navire français et deux chalutiers anglais. Si on ignore quand et dans quelles conditions Jean Ligé rejoignit le sud de la France, on sait par contre qu’il fut l’un des responsables de la CGT clandestine chez les cheminots des Bouches-du-Rhône.


Visiteur de gare à Miramas-Triage au lendemain de la guerre, il devint secrétaire général du syndicat CGT de Miramas, secrétaire de l’Union locale et membre de la commission administrative de l’Union départementale des Bouches-du-Rhône.


Le 29 avril 1945, alors que la capitulation allemande n’avait pas encore eu lieu, Jean Ligé fut candidat sur la "Liste d’Union Républicaine Antifasciste" (URA), d’obédience communiste, qui s’opposa à une liste SFIO aux élections municipales de Miramas. Il faisait partie des quatre candidats présentés au nom de la CGT. La liste comprenait également dix candidats représentant le PCF, quatre l’UFF, quatre le Front national et un l’ARAC. Certains d’entre eux avaient été des élus déchus en 1940, dont l’ancien maire Isidore Blanc. D’autres étaient liés à la Résistance (comme Pierre Massotier ou Fernand Julien), voire avaient été membres du Comité local de Libération (comme Charles Chabany). Cinq femmes, qui votaient pour la première fois, étaient aussi candidates. Jean Ligé totalisa 1601 voix dans les deux sections électorales de la ville sur 2663 suffrages exprimés, ce qui le plaça en 6e position de sa liste. La Liste URA fut élue dans son intégralité dès le premier tour. Quand le conseil municipal se réunit pour la première fois le 19 mai, Isidore Blanc redevint maire.


Lors du scrutin municipal du 19 octobre 1947, Jean Ligé fut le 4e assesseur à la mairie, premier bureau de vote de la première section électorale de la ville. Il était candidat sur la "Liste de Résistance et d’intérêt communal" présentée par le PCF qui s’opposait à une liste SFIO dont faisaient notamment partie Marius Pitra et Charles Sabatier. Sur 23 membres de la liste présentée par le PCF il y avait 19 membres du Parti, parmi lesquels Jean Ligé. Il obtint un total de 1383 voix sur l’ensemble de la commune sur 2739 suffrages exprimés. A la prise de fonction du nouveau conseil, le 26 octobre, Isidore Blanc fut reconduit dans ses fonctions, Louis Cote devint 1er adjoint, Henri Jouve 2e adjoint, Fernand Julien 3e adjoint spécial en charge de Miramas-Village et Jean Ligé 4e adjoint. Ce fut son deuxième et dernier mandat au sein de la municipalité Blanc.


En première ligne lors des grèves de l’automne 1947, Jean Ligé fut révoqué dès décembre. Il travailla après ça comme docker à Marseille jusqu’à la naissance de son dernier fils en 1951. Il s’installa ensuite avec sa famille à Avignon où l’entreprise Mouret Frères l’embaucha comme maçon.


12 mars 1982. Ligé et Deluy en tête de cortège, le jour de leur réintégration à Miramas. Photo tirée de l’ouvrage Cheminots en Provence (collection Louis Deluy)

Une cérémonie pour sa réintégration, celle de Louis Deluy et de deux autres cheminots, menée par Francis Nardy, secrétaire général du syndicat des cheminots CGT, et Roger Morard, secrétaire adjoint, eut lieu à la gare de Miramas le 12 mars 1982, avec le soutien de Claude Rossi, conseiller général, et Georges Thorrand, maire de Miramas. Elle faisait suite à la loi d’amnistie portée par Charles Fiterman, ministre communiste des Transports. Francis Nardy rappela le courage de Ligé et Deluy en 1947, licenciés parce que membres de la CGT, puis l’épreuve du travail précaire qu’ils avaient connue. La cérémonie se poursuivit devant le Monument aux Morts où Roger Morard rendit un hommage à Pierre Semard, secrétaire de la CGT, fusillé par les Allemands en 1942.


Cérémonie de réintégration devant la gare de Miramas. A gauche, Francis Nardy, au micro, rend hommage à ses camarades amnistiés, Deluy et Ligé, à ses côtés.

Marié à Séverac-le-Château (Aveyron) le 10 juillet 1931 avec Émilie, Rosa Guizard, Jean Ligé avait divorcé en mai 1952. Le 27 décembre de la même année, il s’était remarié avec Henriette Augier, fille du cheminot Célestin Augier. Il était père de quatre enfants, Raymond, Georges, Jeanine et Frédéric, nés respectivement en 1934, 1937, 1948 et 1951.


Son fils aîné, Raymond Ligé, cheminot lui aussi, fut candidat lors des élections municipales de mars 1971 sur la liste conduite par l’instituteur communiste Georges Thorrand.


Sources : Archives mun. Montpellier, Naissances, 1910, Acte n°73 (annoté en marge), 1E140. — Arch. Fédération CGT des cheminots. — Arch. Dép. des Bouches-du-Rhône, 9W 35 ; 41W 314 ; 41W 320 ; 41W 330 ; 41W 334. — La Marseillaise, 13 mars 1982 (photo). — Miramas-Info, juin 1982. — Amiral Lepotier, Les Derniers torpilleurs, France-Empire, 1969 (pp. 226-231). — Robert Mencherini, Jean Domenichino, David Lamoureux, Cheminots en Provence. Des voix de la mémoire aux voies de l’avenir (1830-2001), Paris, La Vie du Rail, 2001, p. 184 (photo). — Site Généanet. — Témoignage de Frédéric Ligé. — Archives Ligé-Rossi.


1ere version pour Le Maitron par Jean-Pierre Bonnet : 28 mai 2021.

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Passionné d'histoire, j'ai collaboré pendant plusieurs années au Maitron, dictionnaire biographique du mouvement ouvrier - mouvement social.

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