GEYMET Lucienne [née PICOLLET Lucienne, Roselyne, Françoise]
Dernière mise à jour : 19 avr.
Née le 20 février 1940 à Berre-l’Étang (Bouches-du-Rhône) ; contractuelle dans l’Éducation nationale, tireuse de plans à Shell-Berre, puis sans profession ; militante communiste de Miramas (Bouches-du-Rhône) ; membre du comité local de l’UFF.
Le père de Lucienne Picollet était François Picollet, né à Salon-de-Provence (Bouches-du-Rhône) et ouvrier des pétroles à Shell-Berre. Il était originaire du village du Verneil (Savoie), où un hameau porte d’ailleurs le nom des Picollets. Sa mère, Charlotte Prat, née à Villeneuve-La Salle (rattaché aujourd’hui à la commune de Serre Chevalier, Hautes-Alpes) était sans profession et issue d’un milieu paysan. Avant de se rencontrer, les parents étaient tous les deux veufs. Le père avait eu deux fils d’un premier mariage, la mère un garçon et une fille. Ils s’étaient rencontrés dans l’orphelinat dans lequel leurs enfants respectifs avaient été placés. Mariés en 1939, François et Charlotte Picollet eurent trois enfants ensemble : Lucienne, l’aînée ; Charles, né en 1942 ; Simone, née en 1948.
Dans son enfance, Lucienne Picollet voyait son son père acheter régulièrement La Marseillaise. À douze ans, elle lisait le journal communiste, sans forcément tout comprendre. Un de ses frères du côté maternel, Gay Caire, militait à l’UJRF. Il répondait aux questions de sa sœur, posant les jalons de sa culture politique. Il l’emmenait parfois avec lui lors de ses ventes de L’Avant-garde sur le marché de Berre. Plus tard Guy Caire fut secrétaire de mairie sous la municipalité du communiste Roger Martin. Professeur à Sciences-Po, il soutint sa thèse sur la CGT avec Henri Krasucki comme membre du jury.
Pendant deux étés, Lucienne Picollet travailla dans une maison d’enfants à Villeneuve-La Salle, avant de devenir contractuelle de l’État. Elle le resta de janvier 1959 à avril 1961, faisant des remplacements dans l’Éducation nationale dans les Bouches-du-Rhône : au lycée Mignet d’Aix-en-Provence, au rectorat d’Aix, puis au lycée de L’Empéri de Salon-de-Provence. Suivant les conseils de son frère Guy Picollet, dessinateur industriel à Shell-Saint-Gobain, elle travailla sur le site de Berre en 1961. Durant deux ans elle fut tireuse de plans auprès des dessinateurs industriels.
Le 9 septembre 1961, elle épousa le cheminot syndicaliste Jean-Paul Geymet. Elle décida d’arrêter de travailler pour s’occuper de leur fille, puis de leur fils qui vint quatre ans plus tard (la première devint infirmière, le second enseignant). Le couple fut d’abord domicilié à Salon-de-Provence avant de s’installer à Miramas en 1963. Lors des grèves de 1968, bien qu’elle ne fût pas très politisée, Lucienne Geymet se rendait parfois aux réunions avec son mari.
Mère au foyer, elle faisait beaucoup de bénévolat dans des associations, dont l’Union des Femmes Françaises. À partir de 1975 elle était membre du PCF. Vers 1977, elle se rendit à un débat animé par Guy Hermier à la mairie de Miramas. L’orateur lui fit une forte impression. Elle fut candidate au 1er tour des municipales de Miramas, le 13 mars 1977, sur la "Liste d’union de la gauche et des démocrates", présentée par le PCF et "des démocrates" et conduite par l’instituteur Georges Thorrand. Cette liste comptait six femmes contre quatre sur la liste de droite et deux sur la liste socialiste. Lucienne Geymet était décrite comme "mère de famille". Au second tour, le PCF avait fait liste commune avec d’autres partis de gauche et elle ne faisait plus partie des candidats. Le 11 avril 1981, Lucienne et Jean-Paul Geymet étaient présents au meeting de Georges Marchais au stade Vélodrome de Marseille.
Durant la grande grève cheminote de l’hiver 1986-1987 pour l’amélioration des conditions de travail, le retrait de la grille des salaires et la hausse du pouvoir d’achat, un "Comité des femmes de cheminots" se créa à Miramas. Lucienne Geymet en fut une animatrice importante. A cette occasion elle fut interrogée pour le bulletin municipal de Miramas. Au nom de l’UFF, elle faisait appel à la solidarité des Miramasséens avec les grévistes. Cinquante d’entre elles étaient présentes tous les jours dans la petite salle du Comité d’Établissement de la rue Voltaire. Parmi elles il y avait notamment Éliane Vighetti, Andrée Cambres (femme de Robert Cambres), Colette Travier et Michèle Clémencier (femme de Roger Clémencier), toutes membres de l’UFF. Elles menèrent des collectes de fonds auprès des commerçants, récupéraient les invendus auprès des agriculteurs des environs et achetèrent des cafetières pour réchauffer leurs maris pendant un hiver particulièrement rude. Elles firent leur propre banderole et organisèrent un départ en autocar pour la manifestation à Marseille du 6 janvier. Un système de garderie tournante fut mis en place pour s’occuper des enfants. Face aux CRS, elles bloquèrent des trains en envahissant les voies, houspillant "les renards" (les "jaunes"). Le Comité des femmes de cheminots de Miramas publia propre son journal de lutte, Sur la voie... Voix des femmes. Dans le bulletin municipal, elles s’adressaient à Bernadette Chirac, femme du Premier Ministre : "Est-ce que Mme Chirac pourrait boucler son budget avec la paye d’un cheminot ? Nous, on ne demanderait qu’une seule paye de M. Chirac". La grève durait alors depuis un mois. Pendant toute la durée du mouvement elles allèrent manifester à Marseille à plusieurs reprises. Lucienne Geymet était présente lorsque les cheminots posèrent des traverses de chemin de fer sur la Canebière (l’artère principale de Marseille) pour bloquer la circulation. Parce qu’elle parlait bien, elle fut choisie avec deux autres femmes pour rencontrer un responsable de la SNCF à Marseille et présenter les revendications de leurs maris. Elles étaient accompagnée par Georges Thorrand, maire de Miramas. Après la victoire de la grève, elle fit également partie de la délégation qui vint remettre à Georges Thorrand un album photo retraçant la lutte du Comité des femmes de cheminots. Pour finir, elles organisèrent une exposition présentant l’historique du mouvement.
En 1991, Lucienne Geymet participa à un appel de 50 femmes de Miramas à manifester à Marseille contre la guerre en Irak le 12 janvier "en dehors de tout clivage religieux, politique, philosophique". Lors des grèves de novembre-décembre 1995 contre le Plan Juppé sur les retraites et la Sécurité Sociale, elle participa au mouvement aux côtés de son mari et se rendit aux manifestations à Marseille.
Suite au décès de son mari en 2015, elle adhéra comme lui à la CGT afin de poursuivre son combat. En 2021, bien que moins active que par le passé, elle était toujours bénévole pour des associations, aidant également ses proches à accomplir les formalités importantes.
Sources : Bulletin de vote (avec la liste des noms des candidats) du 13 mars 1977. — Miramoi, mensuel d’information de la ville de Miramas, n°5, février 1987. — Tract des femmes de Miramas appelant à la manifestation du 12 janvier 1991 contre la guerre en Irak. — Robert Mencherini, Jean Domenichino, Cheminots en Provence : Des voix de la mémoire aux voies de l’avenir (1830-1901), Ed. La Vie du Rail, 2001 [photographie p. 193]. — Propos recueillis auprès de Roger Juana. — Témoignage de l’intéressée en mai 2021.
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